En contrebas du village, dressée entre ciel et terre, la haute cheminée de l'ancienne briqueterie de Castelnau d'Estrétefonds, appartenant au marquis de CAMBOLAS, veille encore sur le paysage.
Silencieuse mais fière, elle rappelle qu'ici, il y a plus d'un siècle, le feu ne s'éteignait jamais.
Cette flamme alimentait les fours à briques et à tuiles qui donnèrent au village son visage de brique rouge et sa réputation de savoir-faire.
En observant le muret voisin de la cheminée, on distingue une tuile brisée, marquée en creux :
"Castelnau d'Estrétefonds-.
Ce simple estampillage suffit à faire renaître tout un pan de l'histoire locale.
Il s'agit d'une tuile produite sur place, dans la tuilerie entre 1870 et 1930.
À cette époque, une centaine d'ouvriers façonnaient, séchaient puis cuisaient des milliers de tuiles et briques dans le four HOFFMANN, un four continu à feu tournant, moderne pour son temps.
Chaque moule portait le nom du lieu de production : un sceau de fierté, une garantie d'origine.
Cette tuile estampillée est donc une signature de terre, une marque de Castelnau d'Estrétefonds elle-même.
Quelques mètres plus loin, un autre vestige attire le regard : : un amas de terre cuite déformée et vitrifiée, mêlant teintes jaunes et noires.
C'est une coulée de four, un accident de cuisson survenu dans le coeur brûlant du four HOFFMANN.
Quand la chaleur dépassait 1000°C, certaines tuiles fondaient et se soudaient entre-elles.
Invendables, ces blocs étaient ensuite réemployés sur place pour consolider les murets ou combler les fondations.
C'est également ce que l'on observe aujourd'hui sur ce muret : un rebut de cuisson transformé en fragment d'architecture.
Ces deux vestiges, "la tuile estampillée" et la "coulée de four", résument à eux seuls la vie de la briqueterie de Castelnau d'Estrétefonds :
- Le savoir-faire maîtrisé, inscrit dans la terre et signé du nom du village,
- Et la puissance du feu, parfois indomptable, qui laissait ses traces dans la matière.
Ils rappellent aussi la ténacité des hommes et des femmes qui ont bâti, brique après brique, le visage de la commune.
Aujourd'hui, la cheminée demeure, sentinelle du passé et repère pour les Estrétefontains.
Devant elle, ce mur parsemé de tuiles fondues ou estampillées, est une archive à ciel ouvert, fragile mais précieux. Il suffit de l'observer pour entendre le souffle du four et le murmure des tuiliers.
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